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[FR] 20 ans après les accords de paix de Dayton, que devient la Bosnie-Herzégovine?


20 ans après les accords de paix de Dayton, que devient la Bosnie-Herzégovine?

Ce 14 décembre 2015 marque le vingtième anniversaire des « Accords de paix de Dayton ». Ratifiés à Paris, ils mirent fin, dans ce pays qu’on appelait alors l’ex-Yougoslavie, à la guerre de Bosnie, le plus épouvantable des conflits, en Europe, depuis la Seconde Guerre mondiale: 100.000 morts et 2 millions de réfugiés en quatre ans, de 1991 à 1995! Entretien, à ce douloureux sujet, avec le représentant de la République Serbe de Bosnie (Republika Srpska) à Bruxelles, Mario Djuragic.

Daniel Salvatore Schiffer: Les Accords de Dayton sont historiques puisque, signés le 14 décembre 2015 à l’Élysée, devant le président Jacques Chirac, par les trois belligérants en cause – Slobodan Milosevic pour les Serbes, Alija Izetbegovic pour les Bosniaques et Franjo Tudjman pour les Croates -, ils instaurèrent la paix, après quatre ans d’une guerre tragique, en cette région de l’ex-Yougoslavie qu’est la Bosnie. Quel est à ce propos, en tant que représentant de la « Republika Srpska » dans la capitale européenne, votre sentiment ?

Mario Djuragic : Il y a vingt ans, cette tragique guerre en Bosnie-Herzégovine s’est terminée par la signature d’une série de traités, qui se composent d’un accord-cadre général pour la paix et de onze accords annexes séparés. Ils sont effectivement connus sous le nom d’ « Accords de paix de Dayton ». Il est à noter que la République Serbe de Bosnie est signataire de chacun de ces accords.

Cet événement d’une grande importance n’aurait pu avoir lieu sans le soutien des États-Unis, de la Russie, de l’Union Européenne, de l’Allemagne, de la France, de la Grande Bretagne, qui l’ont signé en tant que témoins. Nous sommes reconnaissants envers ces pays qui nous ont aidés à entrer dans une ère de paix, mettant fin à cette terrible guerre. Ces accords ont établi une structure constitutionnelle permettant à la Bosnie-Herzégovine d’être un pays très décentralisé, qui se compose de deux entités : la Fédération Croato-Musulmane, plus connue sous le nom de Fédération de Bosnie-Herzégovine (FBH) et la République Serbe de Bosnie (RS, Republika Srpska). Ces deux entités sont liées par une autorité centrale limitée.

« Les accords n’ont jamais eu une véritable chance de réussir »

D.S.S. : De ce vingtième et important anniversaire, la presse internationale tout autant que nos responsables politiques parlent peu cependant : aucune commémoration officielle prévue, contrairement à ce qui se passa pour le vingtième anniversaire du massacre de Srebrenica, en Bosnie toujours, ou même de l’opération « Tempête », en Krajina, région de Croatie, d’où plus de 250.000 Serbes furent pourtant expulsés en trois jours seulement, entre les 2 et 5 août 1995. Pourquoi ?

Mario Djuragic : La République Serbe commémore et retient le 21 novembre, quand les accords ont été signés, comme un jour férié national : ce qui n’est pas le cas dans la Fédération de Bosnie-Herzégovine. Ceci montre les différentes attitudes envers les Accords de paix de Dayton et répond partiellement à votre question. Les Accords de paix de Dayton n’ont jamais eu une véritable chance de réussir. Cette chance a été plutôt donnée au Bureau du Haut Représentant, ainsi qu’à d’autres institutions, comme la Cour Constitutionnelle de Bosnie-Herzégovine.

D’autre part, les diplomates ont fait tout pour détruire les garanties des Accords de paix de Dayton en imposant des modifications constitutionnelles censées centraliser la Bosnie: ce qui est contraire à ces mêmes Accords de Dayton ! Ces modifications n’ont jamais rencontré de grand soutien au sein de la Bosnie-Herzégovine. Au contraire, ils représentent l’ordre du jour de certains dirigeants politiques de la Fédération qui militent pour une Bosnie-Herzégovine sans entités, ou avec des entités qui sont politiquement non pertinentes, voire impuissantes.

D.S.S. : La République Serbe de Bosnie remet-elle donc en question l’autorité du Haut Représentant, bien que cette fonction ait été établie par les Accords de paix de Dayton ? Si tel était le cas, cette même « Republika Srpska » ne violerait-elle pas, ainsi, ces derniers ?

Mario Djuragic : En tant que signataire de l’annexe 10, la République Serbe de Bosnie a créé, avec les autre négociateurs, la fonction du Haut Représentant. C’est une grande ironie des Accords de paix de Dayton : les accords qui ont mis un point final à la violation des droits de l’homme, et établi la primauté du droit, ont été utilisés à mauvais escient, comme des accords qui violent d’autres droits de l’homme et piétinent la primauté du droit. Je parle de ce que le Haut Représentant est malheureusement devenu.

Après la signature desdits accords, le Haut Représentant s’est déclaré dépositaire du pouvoir : ce qui ne peut en aucun cas être justifié, même pas par l’interprétation la plus libre de cette annexe 10. Il a promulgué des lois, modifié la Constitution et puni un certain nombre d’individus par un décret unilatéral contraire aux Accords de Dayton, à la Constitution de la Bosnie-Herzégovine, aux actuels droits de l’homme et aux autres traités internationaux. Le Haut Représentant a également bloqué toutes les formes de contrôles judiciaires de ses actions.

Ce sont là les raisons pour lesquelles l’Assemblée nationale de la République Serbe de Bosnie a appelé ses citoyens à un référendum destiné à les consulter sur les actes de ce Haut Représentant. Malheureusement, les États-Unis et l’Union Européenne s’y sont opposés. Chaque individu doit se demander quelles justifications ont les USA et l’UE pour soutenir la prévention des citoyens d’exprimer leur point de vue sur les fonctionnaires et les institutions qui exercent sur eux les pouvoirs exécutif, législatif et judiciaire. Si ces citoyens ne peuvent exprimer leur opinion sur ceux qui les gouvernent, en leur imposant même leurs lois, alors les citoyens de Bosnie-Herzégovine ne jouissent pas des droits humains et civils élémentaires !

D.S.S.: L’ été dernier, 11 juillet 2015, a également vu la commémoration du vingtième anniversaire du génocide de Srebrenica : près de 8.000 Musulmans de Bosnie, hommes et adolescents confondus, y furent tués, sous le regard atterré mais impuissant de 400 « casques bleus » néerlandais, entre les 8 et 11 juillet 1995, par les forces militaires serbes, alors commandées par le général Ratko Mladic. Les Serbes refusent, à ce sujet, le qualificatif de « génocide » pour lui préférer celui, plus adapté aux faits réels selon eux, de « massacre ». Quel est, sur ce point, votre analyse, sinon, sans tomber pour autant en un révisionnisme historique de mauvais aloi, votre vision, honnête et objective, des faits ?

Mario Djuragic : Votre question reprend partiellement ce qui a été présenté, au sein des médias occidentaux, comme étant l’histoire officielle. On nous a d’ailleurs demandé, à de nombreuses reprises, de ne pas contester cette version. Les attaques de villages serbes, aux alentours de Srebrenica, par les forces musulmanes entre janvier 1992 et juillet 1995, la démilitarisation inappliquée des forces musulmanes, l’évacuation des femmes, des enfants et des vieillards bosno-musulmans, ainsi que le corridor ouvert par l’Armée de la République Serbe après la chute de Srebrenica le 11 juillet 1995, doivent être pris en considération avant de tirer des conclusions hâtives ou orientées, et, de ce fait, partielles ou erronées.

Il existe différents points de vue sur ce qui s’est passé à Srebrenica et ses alentours durant la guerre. Par exemple, le professeur Dr. Edward Herman considère que Srebrenica est « une gigantesque fraude politique » et un prétexte pour une invasion « humanitaire » de l’Ex-Yougoslavie de la part de l’Occident. J’espère que les experts et les historiens révéleront un jour ce qui s’est réellement passé, sans manipulations des faits ni intoxication médiatique, mais d’ici là toutes les victimes de Srebrenica, Serbes et Musulmans confondus, méritent notre compassion. Elles ne devraient plus être une arme politique pour un pouvoir interventionniste ou pour les dirigeants politiques locaux.

D.S.S. : Ce général Ratko Mladic, tout comme Radovan Karadzic, l’ancien président et responsable politique de cette même République Serbe de Bosnie, sont aujourd’hui formellement inculpés, par le Tribunal Pénal International pour l’ex-Yougoslavie (TPIY), dont le siège est à La Haye, de « crimes de guerre », de « génocide » et de « crimes contre l’humanité » : de très graves chefs d’accusation !

Mario Djuragic : Le but de ce tribunal devrait être de rendre justice aux victimes du conflit. Mais les procès interminables et les décisions controversées ont conduit, au contraire, à une perte de confiance croissante envers lui. Les condamnations annulées par le TPIY des généraux croates Ante Gotovina et Mladen Markac, du dirigeant Ramus Haradinaj du Kosovo ou du Musulman de Bosnie Naser Oric, montrent que ce TPIY a été créé pour juger les Serbes, pour concentrer la culpabilité d’un seul côté, et ainsi réécrire l’histoire de la désintégration de la Yougoslavie. Cela ne contribuera pas à la justice, mais entravera plutôt la réconciliation dans l’ex-Yougoslavie. Je crains donc que le président Karadzic et le général Mladic aient été condamnés avant même que leur procès ait commencé.

D.S.S. : Les Serbes ont souvent accusé l’ancien président Bosno-Musulman, Alija Izetbegovic, de « fondamentalisme » : preuve en serait, à leurs dires, une tristement célèbre « Déclaration Islamique » qu’il aurait publié, en 1970, à Istanbul, en Turquie. Ils ont même soutenu, à l’époque, que l’armée bosniaque était alors infiltrée, en vue du djihad, par de fanatiques « moudjahidin », venus du Pakistan, d’Afghanistan et d’Iran, d’Al-Qaïda, horrible préfiguration de qu’est devenu, aujourd’hui, l’encore plus abominable État Islamique. Qu’en est-il exactement ?

Mario Djuragic : Bien que les principaux médias occidentaux aient présenté Alija Izetbegovic comme un leader laïc et modéré, il était en réalité un extrémiste islamiste convaincu. Dans sa jeunesse, il était membre de l’équivalent, en Bosnie, des Frères Musulmans. Pendant la Seconde Guerre mondiale, ce groupe a contribué à recruter des militants en vue de constituer la première division de SS non-allemands de Himmler : ce fut la division bosniaque de SS « Handzar ».

Quelques-uns des terroristes les plus « célèbres » du monde

Le but d’Izetbegovic et de ses collègues depuis cette époque, selon leurs propres mots, était « la création d’un grand État musulman » s’étalant des Balkans à l’Afrique du Nord et au Moyen-Orient. En 1970, Izetbegovic écrivait qu’ « il ne peut y avoir de paix ou de coexistence entre la foi islamique et les institutions politiques et sociales non-islamiques ». Pendant la guerre civile en Bosnie-Herzégovine, dans les troupes d’Izetbegovic, il y avait des individus connus comme étant quelques-uns des terroristes les plus « célèbres » du monde, et qui, plus tard, seront directement impliqués dans les attentats de New York (les tours jumelles du World Trade Center, le 11 septembre 2001), Londres, Paris, Madrid, Istanbul, Mumbai et Bali, parmi d’autres nombreux endroits à travers le monde.

En cette année 2015 justement, le vétéran djihadiste bosniaque Naser Bin Ali Ansi a revendiqué la responsabilité des attaques de Charlie Hebdo, le 7 janvier dernier. Pis : Oussama Ben Laden, ancien chef d’Al Qaïda, a reçu un passeport bosniaque, en 1993, à Vienne. Après cette guerre des Balkans, la plupart de ces Moudjahidin se sont installés en Bosnie-Herzégovine. Ce pays est devenu leur repaire et leur terrain de formation. Aujourd’hui, par habitant, la Bosnie-Herzégovine est le leader européen dans l’approvisionnement de candidats pour l’État Islamique : triste record, qui est le funeste héritage, hélas, d’Alija Izetbegovic !

D.S.S. : L’actuel Premier Ministre de la République de Serbie, Alexander Vucic, s’est rendu à Srebrenica l’été dernier afin de s’y recueillir, dans un geste de paix et en hommage aux victimes, devant le mémorial de Potocari, là où sont enterrés ces martyrs de ce que l’on appelait alors « l’épuration ethnique ». Alexander Vucic, bien qu’il ait présenté officiellement ses excuses et même demandé pardon, au nom des Serbes, pour ce massacre, a failli cependant y être lynché publiquement. Comment interprétez-vous ce grave incident, tant sur le plan diplomatique que politique, sinon, plus simplement et dramatiquement encore, humain ?

Mario Djuragic : La visite à Srebrenica par Premier ministre serbe Aleksandar Vucic, en juillet dernier, a révélé deux choses. Il a montré, premièrement, que les dirigeants serbes ont la volonté sincère d’exprimer leur respect pour les victimes de la tragédie de Srebrenica, d’essayer de guérir les blessures des années 1990, et de tenter d’accélérer le processus de réconciliation dans la région. Mais, deuxièmement, l’attaque à l’encontre d’Alexander Vucic a également montré qu’il subsiste, en Bosnie-Herzégovine, des éléments extrémistes, qui veulent saboter ces efforts et provoquer de nouveaux conflits.

Davantage : aujourd’hui même, cinq mois après cette attaque contre le Premier ministre par une foule criant « Allah Akhbar », personne, en Bosnie-Herzégovine, n’a encore été tenu responsable pour ce méfait : ce qui constitue un exemple unique en Europe ! Ainsi, outre prouver la violence et le danger de ces mouvements extrémistes en Bosnie-Herzégovine, ce cas démontre aussi comment le système judiciaire de Bosnie-Herzégovine, qui est sous le contrôle de Bakir Izetbegovic, fils d’Alija Izetbegovic, est corrompu et inefficace.

D.S.S. : Comment les deux entités socio-politiques de la Bosnie-Herzégovine, la Republika Srpska et la Fédération Croato-Musulmane, y vivent-elles, vingt ans après la signature de ces Accords de Dayton, aujourd’hui ? Y a-t-il, entre leurs dirigeants politiques et responsables administratifs, un réel climat de confiance, constructif et durable, qui s’y est instauré? Les choses, par-delà les apparences, les discours de circonstance et les photos officielles, se sont-elles véritablement pacifiées ?

Mario Djuragic : La majeure partie du travail concernant effectivement les citoyens de Bosnie-Herzégovine se fait au niveau des deux entités, la Fédération Croato-Musulmane et la République Serbe de Bosnie. Cela reflète la façon dont les compétences constitutionnelles ont été réparties selon les Accords de paix de Dayton. Il existe cependant aussi d’autres questions importantes, où l’accord entre ces deux entités s’avère crucial : la mise en œuvre d’un grand nombre de réformes requises par le processus d’adhésion à l’Union Européenne, ainsi que des interventions d’urgence, comme les terribles inondations de 2014. Mais la coopération entre les autorités de tutelle dans les deux entités s’avère, globalement, bonne.

«Administrations zombies »

D.S.S. : Comment, plus précisément encore, fonctionne aujourd’hui, sur le plan des institutions politiques, la Bosnie-Herzégovine ?

Mario Djuragic: Malheureusement, la plupart des institutions politiques au niveau de l’État de Bosnie-Herzégovine ne fonctionnent pas efficacement, ou dans l’intérêt de ses citoyens. Un rapport établi, à ce propos, par l’International Crisis Group (ICG) a assimilé ces institutions centrales à des « administrations zombies ». Elles servent principalement les intérêts des institutions elles-mêmes, sous la protection de hauts responsables politiques.

La création de la plupart de ces institutions a été imposée par les décisions du Haut Représentant, avec le soutien de la communauté internationale, comme un moyen de transférer le pouvoir des entités fédérées au niveau de la Bosnie-Herzégovine. Alors que les transferts de pouvoirs étaient justifiés par la création d’une gestion plus efficace, le résultat a été l’inverse. La constitution de la Bosnie-Herzégovine est claire dans l’octroi aux deux entités d’une autonomie importante et un pouvoir central faible. Cette décentralisation a comme conséquence la nette amélioration de l’efficacité et de la responsabilisation, même si, à ce sujet, il persiste des difficultés avec certains membres de l’UE.

D.S.S. : Les Serbes ont souvent reproché à la communauté internationale, aux intellectuels occidentaux et à la presse en général, de les avoir outrancièrement « diabolisés », pendant la guerre en ex-Yougoslavie et y compris durant celle du Kosovo, tandis qu’ils ont systématiquement « angélisés, au contraire, la partie adverse, que ce soient les Bosno-Musulmans, les Croates ou les Albano-Kosovars. Quel est, à ce sujet, votre point de vue ?

Mario Djuragic : Ce qui est arrivé en Bosnie dans les années 1990 était une horrible guerre civile. Tous les peuples de Bosnie – Serbes, Croates et Musulmans – ont souffert de cette douloureuse tragédie. Malheureusement, je pense qu’un examen objectif de la plupart des commentaires internationaux durant cette guerre, et même après, montre la partialité, infondée, contre les Serbes.

Cette interprétation simplificatrice et souvent fallacieuse, cette histoire partielle et réductrice du conflit, comme cela est arrivé en Bosnie-Herzégovine, n’est certes pas d’une grande aide pour tous ceux qui cherchent, sincèrement, une véritable réconciliation entre ces peuples ainsi qu’une vie meilleure pour tous les citoyens, sans distinctions ni discriminations d’aucune sorte, de Bosnie-Herzégovine.

L’adhésion de la Bosnie-Herzégovine « bloquée depuis des années »

D.S.S. : Ce climat d’hostilité que les Serbes ont souvent dénoncé à leur encontre a-t-il changé aujourd’hui, vingt ans après ces Accords de Dayton ?

Mario Djuragic : Nombreux, malheureusement, sont encore ceux qui tentent de conserver ces faux stéréotypes à des fins politiques et idéologiques, destinées à préserver le récit créé pendant la guerre. Aussi, l’érudition sérieuse et le travail objectif sont-ils encore trop souvent attaqués, critiqués outrageusement, par ces mêmes personnes. Le gouvernement et le peuple de la République Serbe de Bosnie considèrent cependant, quant à eux, qu’il est primordial que l’histoire soit bien comprise. Ainsi, la direction actuelle de la « Republika Srpska », qui ne faisait pas partie du Gouvernement pendant la guerre, se concentre-t-elle, principalement, sur la construction d’un avenir coopératif et prospère pour la Bosnie-Herzégovine. C’est là sa priorité !

D.S.S. : Quelles sont les relations actuelles entre la Republika Srpska, dont vous êtes le représentant officiel à Bruxelles, et l’Union Européenne ? Y-a-t-il un espoir qu’elles s’améliorent, plus concrètement ?

Mario Djuragic : Bien que l’idée de devenir membre de l’Union Européenne soit largement acceptée dans tout le pays, la Bosnie-Herzégovine se trouve bloquée, depuis des années, sur ce chemin. Et ce, parce que ce processus a été usurpé par des acteurs locaux, sinon internationaux, dans le but de changer le système politique en Bosnie-Herzégovine, pourtant garanti par les Accords de paix de Dayton.

Le moment est cependant venu d’examiner attentivement, de façon réaliste, quels concepts, pour la Bosnie-Herzégovine, sont réellement applicables. L’UE doit admettre la réalité politique et constitutionnelle du pays. La logique voudrait, ensuite, que tous les niveaux de pouvoir, en Bosne-Herzégovine, soient rendus pleinement opérationnels, conscients de leurs obligations européennes, et mis ensemble, en un seul paquet, à travers un mécanisme de coordination approprié permettant d’aller, dans le même temps et de façon égale, vers l’UE. Mais cela dans le cadre du concept d’État!

Ainsi, de son côté, la République Serbe de Bosnie fait-elle de sérieux efforts pour rapprocher ses projets de lois avec l’acquis communautaire, afin de maintenir également de bonnes capacités administratives pour le suivi de l’UE en relation avec les lois et les règlements en vigueur : c’est là ce qui a été reconnu, et ce dont s’est félicité, l’UE dans son rapport sur les progrès de la Bosnie-Herzégovine en 2014. Ceci est d’une importance vitale pour le processus d’adhésion à l’UE, puisque 73% des exigences relatives à l’harmonisation des lois avec le droit communautaire doit être mis en œuvre par la République Serbe de Bosnie, conformément à la Constitution de la Bosnie-Herzégovine. Nous sommes prêts à aller de l’avant, pour le bien de tous !

D.S.S. : De manière plus spécifique, quels sont les rapports que la République Serbe de Bosnie entretient aujourd’hui avec la Serbie, votre « mère-patrie », et, plus précisément, l’actuel pouvoir en place à Belgrade ?

Mario Djuragic : La République de Serbie est l’un des garants des Accords de paix de Dayton. Notre relation est basée sur un accord de relations spéciales et parallèles découlant directement de celui-ci, et dont l’objectif est d’accroître notre coopération dans différents domaines. En outre, la Serbie est un partenaire commercial important, et un investisseur majeur, en République Serbe de Bosnie.

Nos relations sont bonnes sur le plan politique, avec une excellente coopération : ce qui, par ailleurs, peut être également observé dans les relations entre la Serbie et la Bosnie-Herzégovine. La Serbie a toujours été un partenaire constructif et honnête pour la Bosnie-Herzégovine. Elle a grandement contribué au développement de ce pays : preuve en est la récente réunion entre le Gouvernement de Serbie et le Conseil des ministres de Bosnie-Herzégovine. Je ne peux que m’en réjouir, à l’instar de tout homme de bonne volonté, n’aspirant qu’à une paix juste et durable, comme le désire aussi ardemment le peuple serbe en son ensemble : tout Serbe, sincère et honnête, appelle de ses vœux, la paix, la justice, la vérité et la liberté, ces biens suprêmes de l’humanité !

Propos recueillis par Daniel Salvatore Schiffer*

*Philosophe, auteur de « Requiem pour l’Europe – Zagreb, Belgrade, Sarajevo » (Éditions L’âge d’Homme) et « Le Testament du Kosovo – Journal de guerre » (Éditions du Rocher).

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